Rue Alfred Binet à Nice. La gare CP est à droite, la gare SNCF est tout au fond, sur la gauche.
Correspondance à Digne :
Le Car SNCF Digne - Saint-Auban
Tableau des correspondances SNCF à Digne :
Difficile à rapprocher avec les horaires CP !
Gare SNCF / CP à Digne :
Les voies et le quai SNCF.
|
LA DIAGONALE DU FOU
Tracé rouge : le tracé ferroviaire SNCF Nice- Lyon.
Tracé vert : La diagonale du fou Nice-Lyon, ou Nice Grenoble-Genève.
Il est un sujet qui me
tient particulièrement à coeur, dont on parle de temps
à autre, et qui retourne immanquablement aux oubliettes, comme
bien d'autres concernant les Chemins de fer de Provence : le
désenclavement ferroviaire de Nice.
Remontons à l'ère préhistorique : Au commencement,
il n'y avait rien. Puis commencèrent les travaux de la ligne
Nice-Digne. Ou plutôt devrais-je dire Digne-Nice, car les
travaux ont effectivement commencé à Digne (et en
voie normale). Pourquoi ? C'est très simple. A
l'époque, on ne parlait pas d'une desserte urbaine de Nice,
encore moins d'un désenclavement de Digne, mais d'une liaison -
sérieuse et plus courte - du nord de la France vers Nice, pour
désenclaver l'ex-Comté de Nice, bien perdu dans le
sud-est profond.
Bien plus récemment - c'était il y a vingt ans
à peine - les liaisons Nice-Genève, Nice-Grenoble,
Nice-Lyon étaient d'actualité, l'Alpazur était le
fleuron des Chemins de fer de Provence et était
considéré comme "ce qui sauvait la ligne".
Pensez-vous : Relier Nice à Grenoble en gagnant quelques 220
kilomètres par rapport à la liaison SNCF via Marseille !
Que d'économies d'argent pour le voyageur ! Que de merveilleux
paysages traversés (toute la chaîne des Alpes) pour le
touriste ayant un peu de temps devant lui !
Et aujourd'hui ? Plus rien. Amnésie générale. Les
décideurs ne voient que la desserte urbaine de Nice, au point
d'utiliser des mots vulgaires comme "tramway" ou "métro" pour
imaginer l'avenir du réseau. Les quelques fous qui, comme moi,
considèrent que cette "diagonale" est plus courte, plus
économique, et bien plus belle pour relier les villes du "nord",
sont vus par les décideurs d'aujourd'hui, au mieux comme de doux
utopistes, au pire comme de profonds malades mentaux. Mais que s'est-il
donc passé en vingt ans ?
La grande soeur, la SNCF, n'a jamais vu d'un très bon oeil une
liaison qui lui échappe en partie, plus courte (donc moins
rémunératrice) et plus chère à entretenir.
Bref, moins rentable à tous point de vue. Il est plus simple de
faire passer le bon peuple par Marseille pour monter à Lyon,
liaison plus rapide (TGV) et traversant des régions plus
peuplées. Et, cerise sur le gâteau, les passagers
paient, sans le savoir, le prix fort, le tarif étant toujours
calculé sur une base kilométrique. Donc, son objectif
plus ou moins avoué est de saborder toute liaison plus
économique, qui de plus, passe par la dernière Compagnie
concurrente (survivante) du pays. La suppression de l'antenne
ferrée Digne - Saint-Auban est donc le moyen idéal de
parvenir à ses fins à peu de frais, et en toute bonne
conscience.
Les CP, de leur côté, s'enfoncent dans l'illogisme depuis
20 ans. Aidés en cela par des décideurs politiques
aussi visionnaires que l'homme de néanderthal,
l'évolution de la ligne a été dans le sens
contraire à ce que l'on demande d'une liaison "grande ligne" :
Non concordance entre les gares à Nice,autorails usés et
peu confortables, horaires inadaptés (aucune correspondance
étudiée, ni à Nice, ni à Digne),
rallongement du temps de parcours (de 2h35 à 3h15/3h30
aujourd'hui), politique commerciale inexistante, mésentente avec
la SNCF. Tout ce qu'il ne faut pas faire... a été fait !
Résultat ? Cette liaison Nice-Grenoble, Nice-Lyon ou
Nice-Genève via Digne est considéré comme "la
diagonale du fou". Pourtant, si certaines choses changent, la
géographie, elle, ne bougera jamais. Cette liaison est plus
courte, plus belle, et plus économique. Quels que soient les
investissements, elle ne sera jamais plus rapide. Mais n'y a-t-il que
des hommes d'affaires pressés dans les trains ? Pour l'avoir
pris cet été, en touriste, je sais deux choses : Elle
redonne le goût du train, contrairement à l'avion sur
roues qu'est le TGV. Et on a la sensation, unique, d'être en
vacances sitôt que l'on pose le pied dans la première gare
du parcours. C'est fou, non ?
Alors oui, je suis peut-être fou de considérer cette
diagonale comme une alternative au "tout TGV" côtier. Fou comme
ceux qui voyagent aussi pour le plaisir. Fou comme ceux qui
prédit la fin du "tout routier". Fou comme ceux qui ont créé cette ligne de chemin de fer. Fou comme ceux qui considèrent que la ligne droite est le plus court chemin pour relier un point à un autre.
Je suis fou, enfin, de considérer que tout ce qui a
été mal fait ou défait peut être refait, ici
comme ailleurs. C'est le propre de l'intelligence de l'Homme de savoir
rectifier ses erreurs. Enfin je crois.
William Waechter
|