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Article | Création de cette page le 12/11/06 | Modernisation |
ARTICLE | William WAECHTER |
L'évènement du moment est sans doute le nouveau projet de traversée de la plaine du Var. A l'heure où je vous parle (17h52), nous ne pouvons affirmer avec certitude que notre petit train préféré traversera le Var pour rejoindre Carros et sa zone industrielle. Mais une chose est sûre: il n'en a jamais été aussi près. Dans les paroles - notez bien la nuance quand même - le premier pont est déjà acquis, puisque la discussion entre les décideurs porte aujourd'hui sur le second pont... et l'emplacement du premier ! L'évènement est historique - toujours dans les paroles - car se serait la première fois depuis des lustres que l'on modifierait le tracé d'une voie métrique en France aussi radicalement. Enfin, ce serait la première fois depuis l'homme de néanderthal que la Région (de gauche) et le Conseil Général (de droite) seraient d'accord sur quelque chose ! Alors, tout est beau, les oiseaux chantent et les usagers vont enfin éviter les embouteillages de Nice et Carros ? Enfin, oui, bon, presque. Il faudra voir ça surtout après les élections.
PASSE D'ARMES
Un peu de concret... En juin 2006, la Région nous annonce par la voix de Gérard Piel que le vieux projet (1965) de passage en rive droite du Var par les Chemins de fer de Provence est relancé et sera concrétisé par une énième étude sur le sujet. En octobre, l'affaire se précise puisque nous avons le nom du faiseur d'étude, Arcadis, le montant de l'opération (70.000 euros) et la date du verdict: Février 2007. Michel Vauzelle (Président de Région) fait même une conférence de Presse insolite à Lingostière dans une des voitures de la Rame réversible en panne (qui aura au moins servi à quelque chose). Mais on apprend quasiment en même temps qu'il y a un problème de budget en discussion avec l'Etat dans le Contrat de Projet 2007-2013. Début novembre, le Conseil Général des Alpes-Maritimes se réveille et ne veut pas réitérer le mauvais impact de la réouverture de la ligne Cannes-Grasse qui lui était passée sous le nez. Le 6 novembre, Christian Estrosi (Ministre délégue à l'Aménagement du Territoire et Président du Conseil Général 06) annonce que le Conseil Général donne l'impulsion à ce projet pour qu'il se réalise au plus vite, en votant une délibération afin que le passage en rive droite soit déposé au Préfet de Région (enfin, si j'ai tout compris...), ce qui n'aurait pas été fait par la Région. Nos décideurs vont-ils tous, main dans la main, couper le ruban de la nouvelle ligne en se faisant la bise ? Pas vraiment, en fait. QUAND LE NORD EST A DROITE, LE SUD EST A GAUCHE
Nos décideurs ne savent pas se taire. Remarquez, tant mieux, ça nous fait des choses à écrire ! A l'heure où je vous parle (18h17), une étude est en cours pour évaluer le coût, la faisabilité technique, l'incidence technique et financière sur l'exploitation financière et la pertinence socio-économique des différents tracés possibles. Donc, en principe, tout le monde devrait attendre sagement le verdict des spécialistes. Dans les faits, la Région a dégainé la première en parlant du pont sud "au niveau de Lingostière" et d'une remontée "le plus loin possible" dans la ZI de Carros. Ce à quoi a répondu le Conseil Général par un pont nord également prioritaire pour "désenclaver les vallées". Bref, déontologiquement, et pour garantir l'impartialité du faiseur d'études, le silence aurait été le bienvenu, mais on ne refait pas les politiques. Puisque tout le monde y va de son petit avis éclairé, il n'y a donc plus aucune raison que nous ne mettions pas notre grain de sel ! TOUT CECI EST BIEN JOLI, MAIS...
Vous l'avez compris, tant que cette idée de traversée du Var a les faveurs du public, les deux entités sont d'accord pour mettre la main au portefeuille... A condition que la gloire leur revienne exclusivement. Reste que le coût de l'opération ne se limite pas, loin s'en faut, à la construction de deux ponts et d'une dizaine de kilomètres de voies. Que la ligne se perde en rive droite ou rejoigne la rive gauche au nord, il faut repenser la gare de Nice. Cette gare exiguë est incapable d'absorber le flux de passagers, ni même de garer des autorails supplémentaires (voir l'article RENDEZ-NOUS LA GARE DU SUD). La solution "deux ponts" nécessite moins d'autorails en circulation, mais un terminus urbain "nord" supplémentaire (avec parking).
BILAN
Tout ce qui touche aux Chemins de fer de Provence est ultra-politisé, et cette affaire-ci n'y échappe pas. Le train ayant les faveurs des électeurs, les élus aiment tous le train, ces temps-ci. Mais s'il n'y avait que ça, ce ne serait pas bien grave. Ces passes d'armes droite-gauche pourraient bien faire capoter le projet, et le but des uns et des autres ne pourraient être que celui-ci. Si l'on en croit le Conseil Général, le Conseil Régional n'a pas déposé le projet de passage en rive droite, donc le Conseil Général dépose "son" projet. Seulement le Conseil Général ne finance plus les Chemins de fer de Provence à partir du premier janvier prochain. Donc libre à lui de proposer le projet le plus coûteux, mais logiquement le plus abouti. Si l'on en croit le Conseil Régional, l'Etat rechigne à financer sa part du budget. Donc la Région propose un projet moins coûteux, mais amputé d'un retour de ligne au nord. Chacun se fera son opinion en visionnant s'il le veut la délibération du Conseil Général et la réaction de Patrick Allemand sur son blog. Un coup à droite (vidéo): http://partenaire.endirectv.com/window.php?OPE_ID=37&FEN_ID=111 (haut débit) ou http://partenaire.endirectv.com/window.php?OPE_ID=37&FEN_ID=112 (bas débit) (cliquez ensuite sur "transports - déplacements" et regardez jusqu'au bout du chapitre: les questions sont posées après la résolution 24) Un coup à gauche : http://patrickallemand.canalblog.com/archives/2006/11/07/3105478.html Mais surtout, n'allez pas leur dire qu'au final, on se fiche éperdument de savoir qui a raison et qui a tort. Les seules personnes à remercier lorsque ce projet sera devenu réalité seront ceux qui paient: Nous! Sans compter que cette demande a, en fait, plus de quarante ans... William Waechter
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La rive droite, Du Broc au pont... Le bout de la zone. Au loin, sur l'autre rive, Saint-Martin Certains passages semblent difficiles pour un train... D'autres un peu plus faciles... La plupart carrément faits ! Et ici, on pourrait même croire que l'on a retiré la voie ferrée. le passage du rond-point du pont, lui, semble délicat. Le pont. Au loin, la gare de la Manda (rive gauche) LES PONTS PONT SUD Ici, au niveau de Saint-Sauveur PONT NORD Ici, au niveau de Saint-Martin |
Le GECP commercialise toujours les anciennes revues. Se faire un cadeau et soutenir une asso, quoi de plus merveilleux? |
BONUS : Les Railleries du Train du Sud
Les anciens numéros du "Train du Sud", la revue hélas disparue du GECP (aujourd'hui remplacée par un bulletin du même nom), sont une source inépuisable de renseignements, et la preuve s'il en est besoin que l'histoire n'est souvent qu'une suite de bégaiements. Le dernier grand projet de passage en rive droite date de 1975, soit deux ans avant la parution du premier numéro de la revue. Néanmoins, un autre projet, "l'axe lourd Nice-Carros" (qui lui, a vu le jour) a réveillé l'humour corrosif de Pascal Bejui et Jacques Serailler, dans une rubrique intitulée "Railleries" (Train du Sud N°4 et N°5). Ces deux auteurs ont proposé un contre projet de traversée du Var qui, j'en suis sûr, serait toujours d'actualité. En voici quelques extraits : "Répétons-le,
nous regrettons que
le projet de construction d'un pont-rail sur le Var,
élaboré en 1975, n'ait pu
être concrétisé, en raison de son coût,
estimé à 9 MF. Est-il besoin de préciser
qu'il ne faut voir à l'origine de cet abandon
que la politique d'austérité du Plan Var ? Bien
que gagné de longue date à la cause de l'assainissement
des finances publiques, le G.E.C.P. juge
insatisfaisantes les conditions actuelles d'organisation de la desserte
de la
Zone Industrielle de Carros. Fort d'une inébranlable
crédibilité acquise
auprès de l'Évêché, de la Confrérie
des
Taste-Vins, du Conseil Général, et du Ministère de
Tutelle, il se croit
donc autorisé à mettre en avant une suggestion du plus
haut intérêt, par
l'application de laquelle le Rail pourrait atteindre Carros au moindre
coût :
Puisqu'un franchissement du Var en viaduc s'avère trop
onéreux, il convient de s'orienter vers une traversée
à
niveau, exploitée par autorails amphibies. Cela coule de source.
(...)
La construction d'une traversée ferroviaire à même le lit du Var n'exigerait
en effet que des investissements très limités : il suffirait, pour établir la «Plateforme mixte
Rail/Rivière», d'aménager une rampe d'accès sur chaque digue, d'égaliser
le fond du fleuve sur le tracé, et enfin, bien entendu, de poser une voie
métrique sur l'infrastructure ainsi réalisée. (...)
Le
matériel roulant pouvant être affecté à la
nouvelle liaison
suburbaine existe d'ores et déjà sur les Chemins de fer
de Provence : les autorails Billard 223 et 224, appareils
articulés se pliant aisément aux exigences
de l'exploitation, sont tout désignés par
leur morphologie, et notamment par le dessin de leurs
extrémités, pour
un fonctionnement amphibie. Quelques adaptations de détail
semblent néanmoins
indispensables : travaux d'étanchéité sur les
baies frontales, les portes, et
les soufflets, substitution de hublots aux
baies vitrées latérales, pose d'un périscope
pivotant pour la conduite en réversibilité,
équipement en bouées de sauvetage, mise en
conformité de la signalisation
lumineuse avec les normes de la batellerie... (...)"
Pascal Bejui, Train du Sud N°5, Août 1978 "Les ingénieurs ont en effet déjà
dressé les plans (d'eau) du futur tracé, prévoyant deux équipements
particuliers sur les rampes d'accès au passage à gué : (...)
Des sections
d'auto-ébrouement des trains de part et d'autre de la
traversée
: afin d'éviter toute oxydation prématurée du
matériel, les autorails
s'égoutteront d'eux-mêmes en quittant le Var,
grâce à un éclissage spécial
des rails : il suffira d'écarter les joints de rails encore plus
que sur le reste du réseau, ce qui provoquera les secousses
permettant l'essorage.
Le réseau lui-même prépare également la nouvelle desserte, et est
actuellement à la recherche de scaphandres de réemploi, dont seront dotés les
poseurs du service de la Voie. Par ailleurs, les agents de conduite et
d'accompagnement seront envoyés en stage de formation à la piscine municipale
dans les jours qui viennent, comme
l'exigent les textes réglementaires en vigueur : leur entrainement à la
plongée est en effet obligatoire, comme le sera, dès le début de
l'exploitation, la démonstration par le chef de
train du gilet de sauvetage, avec explication bilingue Nissart et Provençal,
qui rappelera la présentation effectuée par l'hôtesse de l'air avant tout
survol d'une étendue d'eau. (...)"
Jacques Serrailler, Train du Sud N°6, Octobre 1978 |